Agefi Luxembourg - juillet août 2024

AGEFI Luxembourg 38 Juillet / Août 2024 Droit / Emploi Par Maître François BRUSSIEUX, Avocat au barreau de Luxembourg spécialisé en fiscalité internationale, FBX Legal &Tax D ans le cadre des élections législatives 2024 en France, le Nouveau Front Populaire et le Rassemblement Na- tional se sont affichés contre la taxe au tonnage française, aussi appelée «niche fiscale des armateurs». Suite à cette annonce, une tribune signée par une cinquantaine d’armateurs français représentant des entre- prises maritimes parmi les plus grandesdupays (ex : CMA-CGM, Brittany Ferries, Louis-Dreyfus Arma- teurs, CorsicaFerries etc) a étépubliéepourdénon- cer les conséquences dramatiques que cettemesure pourrait avoir sur la compétitivité du secteur mar- itime français, l’emploi et les investissements impor- tants requis dans ce secteur. Certains armateurs ont déjà annoncé qu’ils seraient contraints d’abandon- ner lepavillon français et l’emploi demarins français si une tellemesure était adoptée. Pour rappel, la taxe au tonnage est un régime fiscal permettant aux entreprises maritimes d’être im- poséesnonpassurleursbénéficesréelsmaissurbase de la capacité de leur flotte, mesurée en tonnage net desnavires sous certaines conditions. Elle s’applique à 86%de la flottemaritime dans lemonde et est ap- pliquéepar lamajoritédes étatsmembresde l’union européenne. En France, elle s’applique aux entreprises dont le chiffre d’affaires provient pour 75% au moins de l’exploitation de navires marchands et permet d’obtenir un tauxd’impositioneffectifgénéralementcom- pris entre 0.5%et 4%. Cetteannonce soulèvedesquestions cruciales pour l’industrie maritime en France, mais elle ouvre également des perspectives intéressantes pour d'autres pays européens, notamment le Luxembourg. Bien que dépourvu d’accès direct à la mer, le Luxembourg possède le plus grandregistremaritimedetouslespays enclavés. Il compte principalement des transporteurs, des dragueurs, des re- morqueurs et des navires de ravitaille- ment avec une flotte de plus de 200 naviressouspavillonluxembourgeois.Le secteur emploie directement ou indirectement plus de 1,300 personnes avec environ 400 sociétés actives. Grâce à son expertise notable dans le secteur finan- cier, le Luxembourg se positionne depuis quelques années comme un centre maritime attractif offrant des conditions fiscales et administratives avan- tageuses, attirant de plus en plus d'armateurs étrangers. Le Luxembourg dispose par ailleurs d’un ClusterMaritimeetd’unréseautrèsactifd’entreprises spécialisées dans le secteurmaritime. Contrairement à la France, le Luxembourg ne pos- sède pas de taxe au tonnagemais son système fiscal peut s’avérer d’autant plus intéressant. Les sociétés maritimes luxembourgeoises ne sont généralement pas soumises à l’impôt commercial communal lux- embourgeois étant donné que leurs activités sont principalementeffectuéesendehorsduterritoirelux- embourgeois. Par ailleurs, elles bénéficient de plusieurs dispositifs fiscaux comme les crédits d’im- pôtspourinvestissements,ladéductibilitédesdépré- ciations (linéaires ou accélérées) enregistrées sur les navires, la déduction des provisions pour mainte- nance et réparations importantes, et le transfert des plus-values réalisées sur des navires sur le prix d’ac- quisition de navires exploités en trafic international et battant pavillon luxembourgeois. Ces dispositifs fiscaux permettent généralement aux entreprises maritimes luxembourgeoises d’atteindre un taux d’imposition effectif proche de 0%. Le Luxembourg a aussi entamé des démarches pour favoriser le «green shipping» en réduisant les frais d’immatriculationpourlesnaviresàbassesémissions de gaz à effet de serre (ex : navires à propulsion prépondérante au biocarburant ou au gaz) et enma- jorant lesbonificationsd’impôtspour cesnavires. Par ailleurs, le Luxembourg est membre de nombreuses conventions fiscales internationales permettant de limiter les retenuesd’impôts à la source lorsde ladis- tributionde bénéfices aux investisseurs. La loi du 22 décembre 2023 transposant la directive (UE) 2022/2523 visant à assurer un niveauminimum d'impositionmondial pour les groupes d'entreprises multinationales et les groupes nationaux de grande envergure dans l'Union (impôt minimummondial à 15% - pilier 2) ne devrait pas affecter ce régime fiscal danslamesureoùlebénéficeprovenantdutransport maritime de passagers ou de marchandises en trafic international est généralement exclu de cette loi. La dernière convention fiscale franco-luxembourgeoise signée àParis le 20mars 2018prévoit par ailleurs que les bénéfices provenant de l'exploitation, en trafic in- ternational, de navires, ne sont imposables que dans l'Etat contractant où le siège de direction effective de l'entrepriseestsitué,permettantainsidecoupercourt à toute discussion concernant le lieu d’imposition d’uneentreprisemaritimeeffectivementgéréedepuis le Luxembourg. La fin de la taxe au tonnage en France pourrait donc inciter les armateurs français à transférer leur flotte vers des juridictions plus favorables, comme le Lux- embourg. Sur leplanfiscal, d’autres aspectsdoivent néanmoins êtreprisencomptecommelapropositiondedirective ATAD3etlanécessitéd’avoiruneréellesubstanceau Luxembourg en termes d’infrastructure et d’activité. Cette condition est d’autant plus nécessaire que la loi luxembourgeoise impose aux entreprises maritimes qui s’établissent au Luxembourg d’obtenir un agré- ment par leministre en chargedes affairesmaritimes et de disposer d’un dirigeant d’entreprise maritime résident professionnellement auLuxembourg. L’histoire de la fiscalité nous apprend que les ré- formes fiscales ont souvent accompagnées de grands changements industriels et politiques.Atra- vers la fin de la taxe au tonnage, une page de l’his- toiremaritime françaisepourrait se tourner dans les mois à venir et avec elle celle de navires, de marins et de familles demarinpour s’écrire ailleurs. En tant que pays frontaliers ayant une forte volonté de développer son secteur maritime, le Luxembourg pourrait être une localisation de choix pour les so- ciétés maritimes françaises souhaitant relocaliser unepartiede leurs activitésdansunautre étatmem- bre de l’Union européenne. La fin annoncée de la taxe au tonnage en France, une opportunité pour le secteur maritime luxembourgeois ? S elon Jerôme B LOCH , 360Cross- media, «Après des décennies ‘faciles’, le Luxembourg doit apprendre à vendre et à se vendre à marche forcée». Interview. Existe-t-il une particularité du Luxem- bourg en terme de ventes ? Comme Jean-Claude Biver, l’ancienPDG d’Hublot, le répète toujours, «La singula- rité du luxembourg réside dans l’absence demarchédomestique.Enthéorie,toutes les entreprises devraient se tourner vers l’international, mais la croissance vertigi- neusedupays apermis à laplupart d’en- treellesdeseconsacreruniquementàdes ventes locales. Le succès des années passées ne rimait pas forcément avec une qualité à tous les étages. Les clients venaient au Grand- Duché par eux-mêmes.Avec la crise, cela change. Pour sedévelopper, lesfirmesde toutes tailles vont devoir maîtriser l’art subtilderéussirlesventeslocalesetnom- breusessontcellesquiserontforcéesàdé- velopper des ventes à l’international. Pouvez-vouspartagerlesclefsdusuccès enprospection? Première clef : la communication. Enpo- litique comme en business, il faut savoir s’exprimer de manière courte, claire et transmettre des valeurs plutôt que de simples informations. Le deuxième axe consiste à mettre en place des tactiques durables, avec no- tamment une production de contenus extrêmement efficaces, des budgets très bas et une performance mesurable. L’époque où les gens investissaient de l’argent dans Google Ads juste pour acheter des clicsme semble révolue.Au- jourd’hui, le principal indicateur de per- formanced’une campagne semesure en prospects contactés et en contrats signés. De nombreuses agences de marketing digitale souffrent aujourd’hui car rares sont les stratégies qui rapportent plus qu’elles ne coûtent. Et le dernier point se concentre sur la maîtrise des tech- niques de ventes qui combine une par- tie ‘artistique’ et une composante ‘scientifique’. Or, le Luxembourg, dans ce domaine a des années de retard. Au- jourd’hui nous sommes en concurrence avec d’autres pays comme la France, l’Irlande ou l’Allemagne. Nous devons apprendre à marche forcée à nous bat- tre à armes égales avec des adversaires talentueux. Comment 360 s’adapte à ce nouveau contexte ? Nous allons fêter nos 25 ans en janvier prochain. Mais nous restons toujours – sansdoutedufaitdemonpassédeprode golf - des compétiteurs dans l’âme. C’est sansdoutelaraisonpourlaquellenousfi- délisons tellement d’entreprises de toutes tailles,quiviennentcherchercheznousun partenaire de confiance, capable de leur garantir des conseils extrêmement prag- matiques, une distribution mesurable – mon compte Linkedinvient de passer les 10millionsdevues-maisaussidesvideos professionnelles à un prix extrêmement bas avec la 360Box. Avec nos design sprints, un site internet ou une brochure prennent 1 jour et pas 6 mois. 3,500 euros et pas 35,000 euros. Car in fine, en 2024, un site internet ne représente qu’un tout petit maillon de la chaîne. Il faut impérativement garder du budget et de l’énergie pour mettre enœuvre une stratégie puissance et du- rable, sur plusieurs mois. Let’s make it happen. Prospection, mode d’emploi ©360 L aministre de la Santé et de la Sécurité sociale, MartineDeprez, et le ministre duTravail, Georges Mischo, ont pris part au Conseil «Emploi, politique sociale, santé et consomma- teurs» (EPSCO) qui s'est tenu le 20 juin auLuxembourg, sous présidence belge. Lors du Conseil, les ministres de l'EmploietdesAffairessocialesde l'UEontarrêtélapositiondenégo- ciation du Conseil sur la directive modifiant les règles existantes re- lativesauxcomitésd'entrepriseeu- ropéens, qui représentent les tra- vailleurs des grandes entreprises multinationales opérant dans au moinsdeuxpaysde l'Unioneuro- péenne(UE)oudel'Espaceécono- mique européen (EEE). Lorsdelaprésentationdurapport deprogrèsconcernantunepropo- sitiondedirectivehorizontalepro- mouvant l'égalité de traitement et interdisant la discrimination fon- dée sur la religion ou les convic- tions, lehandicap, l'âgeou l'orien- tationsexuelledansdesdomaines autres que l'emploi, le ministre Georges Mischo a, au nom du Luxembourg, rappelé le soutien dugouvernement à la directive et indiqué qu'«il est grand temps d'envoyer un signal positif et sans équivoque aux groupes encore marginalisés à travers l'UE par l'adoption de cette directive». Un état des travaux par la prési- dence belge a également été pré- senté concernant la directive sur les stages dont l'objectif est de ga- rantir des standards de qualité pour les stages, transformant ces expériences en véritables trem- plins vers l'emploi. Au cœur de ce ConseilEPSCOs'esttenuundébat d'orientation sur la dimension so- ciale dumarché intérieur selon les préconisations du rapport Letta «Bienplusqu'unmarché».Lorsde son intervention, Martine Deprez asoulignéque«lemarchéintérieur devrait être plus inclusif. Cela im- plique de garantir des conditions detravaildécentesetjustes,dedé- finir des règles du jeu équitables pour les entreprises, de déployer desinvestissementssociauxciblés, et d'assurer l'adéquation et la sou- tenabilité des systèmes de protec- tionsociale,envuedecombattrela pauvreté,lesinégalitésetlesdiscri- minations». Les conclusions sur le rôledespo- litiquessocialesdumarchédutra- vail et des compétences pour des économies résilientes ont égale- ment été approuvées par les mi- nistres. Martine Deprez a appelé la Commission et les États mem- bres à capitaliser sur ce texte, no- tamment à travers la création d'une plateforme de connais- sances pour poursuivre l'échange de bonnes pratiques avec les ins- titutions internationales et les lignesdirectricesvolontairespour analyser en profon- deur les re- tourséconomiquesdesinvestisse- ments sociaux. Concernant la déclaration de la Hulpe sur l'avenir du Socle euro- péendesdroitssociaux,quin'apas puêtreadoptéeàl'unanimitéfaute du soutien de la Suède et de l'Au- triche,MartineDepreza,dansson intervention,soulignél'importance de cette déclaration qui tombe à point nomméenamont de lafixa- tiondesprioritésduprochaincycle législatifeuropéenpourréaffirmer le rôle du socle européen comme une boussole pour faire face aux défis actuels et futurs en matière de politiques sociales. La ministre a également réitéré l'engagement du gouvernement luxembour- geoisenfaveurdelaluttecontrela pauvreté, et particulièrement la pauvreté infantile. Le lendemain de sa publication officielle, la Commission a égale- ment présenté le paquet de prin- temps du semestre européen qui comporte l'ensemble des recom- mandations économiques et so- ciales, qui guideront les États membres dans leurs politiques nationalespour 2024. Lemessage principal de ce paquet a trait au renforcement de la compétitivité de l'UE sur la scène internatio- nale, avec un accent particulier sur les thématiques des pénuries de main-d'œuvre et de compé- tences, la transformation structu- relle généréepar ladouble transi- tiondigitale et environnementale, tout en préservant le modèle so- cial européen. La Commission a entreautresprésentéunpland'ac- tion pour répondre aux pénuries croissantesdemain-d'œuvreetde compétences au sein de l'UE. Leministre hongrois a également exposé les éléments saillants de son programme de travail de la prochaineprésidence, offrant une perspectivesurlesprioritésàvenir en vue duprochain semestre. Source : ministère du Travail / minis- tère de la Santé et de la Sécurité sociale MartineDeprez et GeorgesMischo auConseil «Emploi, politique sociale, santé et consommateurs» « Le marché intérieur doit être plus inclusif » de gauche à droite : Martine D EPREZ , ministre de la Santé et de la Sécutité sociale ; GeorgesM ISCHO , ministre du Travail ©Belgian Presidency of the Council of the EU

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