Agefi Luxembourg - novembre 2025
Novembre 2025 7 AGEFI Luxembourg Économie E n réponse à des attentes clients de plus en plus diverses, les banques de détail luxembourgeoises s’adap- tent en privilégiant l’interconnec- tivité et la complémentarité des canaux digitaux et de l’accompa- gnement humain. Un point presse organisé par le Retail Banking Cluster (RBCL) de l’Association des Banques et Banquiers Luxembourg (ABBL) en collabora- tion avec le cabinet de conseil SIA Luxembourg a permis demettre en avant l’évolution des attentes des clients à différentes étapes de leur relation avec leur banque, les spécificités luxembourgeoises en lamatière et les réponses appor- tées par les banques. Des clients plus connectés, plus exigeants et enquête de confiance « Aujourd’hui, les clients sont plus digi- taux, plus exigeants, mais aussi plus atta- chés à la proximité et à la sécurité, » ana- lyse MehdiMekhneche (photo), country manager de SIA Luxembourg. « Leurs attentesenversleurbanquiersontdirecte- ment façonnées par leur vécu de client dans d’autres relations commerciales ». Cesattentesportentprincipalementsurla sécurité (face à une forte hausse des cybe- rattaques),lapersonnalisationdesservices (IA, recommandations, proactivité) et la simplification des parcours par des solu- tions tout-en-un. Dans un contexte trans- frontalier et multilingue, les banques doi- vent concilier conformité réglementaire et fluidité grâce à des infrastructures de confiance (LuxTrust p.ex. ). « Ce sont moins les banques tradition- nelles qui poussent leurs clients vers davantage de digitalisation que l’in- verse », souligne Mehdi Mekhneche. Et de mettre également en avant la concur- rence de la Bigtech et des néobanques. Il souligne que le Luxembourg se situe à la 9 e positionclassementmondialdelamatu- rité digital bancaire publié par SIA Luxembourg (1) :«Ceciprouveunegrande maturité digitale et que les banques luxembourgeoisessaventsemettreaudia- pasonde leurs clients ». De la particularité des banques de détail luxembourgeoises SelonMehdi Mekhneche : « Lemétier de banquierretailauLuxembourgn’ariende comparable à celui pratiquédans lespays limitrophes. Le marché luxembourgeois se distingue en effet, par son contexte transfrontalier, multilingue et fiscalement complexe, exigeant des parcours clients adaptés».Ilillustresonproposparlacom- position démographique de la société luxembourgeoise : « Plus de lamoitié des résidents luxembourgeois sont d’origine étrangère. Ils ont vécudans d’autres pays, ont des cultures financières diverses, ont expérimenté d’autres relations et expé- riences bancaires et peuvent être confron- tésàdessituationsmulti-juridictionnelles. Le banquier luxembourgeois doit jongler avec toute cette diversité. Pour être à la hauteur,lebanquierluxembourgeoisdoit réussir à combiner le meilleur des expé- riencesbancairesdetouslespaysdontses clients sont originaires. » Entre conformité et efficacité, le défides ouvertures de compte « Les banques luxembourgeoises veulent ouvrir des comptes et ont toujours voulu lefaire»,souligne LaurentZahles (photo), vice-chairduRBCLdel’ABBLenprenant le contrepied du discours ambiant. Les encours (dépôts + crédits) des clients par- ticuliers sont restés stables à € 84,1mia. Le secteur bancaire est néanmoins conscient de certains points d’attention au niveau des ouvertures de comptes pour per- sonnesmorales,uneciblepourlaquelleles difficultés se situent à différents niveaux : exigences strictes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le finan- cement du terrorisme, complexité de cer- taines structures, notamment dans le cas des fondsd’investissement, pour les créa- teurs d’entreprise et les investisseurs. Parmilesinitiativesprisesparl’ABBLpour fluidifier les ouvertures de compte, il a notamment mis en avant l’existence de vadémécums pour les entreprises com- merciales et lesASBL. Rédigés encollabo- rationaveclaCommissiondeSurveillance du Secteur Financier (CSSF), ces guides sont disponibles sur le site de l’ABBL (2) . « Nous avons eu un feedback positif sur l’utilisation de ces guides. Généralement, si un dossier d’ouverture de compte est bloqué ou prend davantage de temps, c’est qu’il n’est pas complet et ne peut donc pas être ouvert en raison des exi- gencesducadreréglementaire.Lesentre- prisesetlesASBLquiprennentencompte les indications de ces guides sont mieux préparées », commente Laurent Zahles. Il rappelle également que, sur l’ensemble deladuréeduprocessusd’ouvertured’un compte, 2/3du temps correspondà la col- lecte des documents nécessaires par le client et 1/3 à l’analyse de la banque. Des avancéesenmatièredigitalisationdespro- cessusd’ouverturesdecompte,demutua- lisation des services de connaissance de clients(KYC)etd’interopérabilitéavecdes données publiques sont citées parmi les axes de progrès nécessaires. Prévenir, protéger, coopérer : les piliers de la sécurité numérique bancaire Face à lamultiplicationdes cyberattaques à laquelle les banques sont confrontées et à la complexité accrue des tentatives de fraude,l’ABBLrenforcelacybersécuritéet la lutte contre la fraude en ligne au Luxembourg. À travers son groupe d’ex- pertsTrustandCybersecurity,elleaccom- pagne sesmembres enmatièredebonnes pratiquesetdecoordinationaveclaCSSF, la Luxembourg House of Cybersecurity et ICT Luxembourg. L’Association anti- cipe les risques émergents tels que la fraudeliéeàl’IAetlesmenacespost-quan- tiques, tout en participant à des initiatives européennes. « Les criminels n’arrivent généralement pas à s’introduire dans les systèmes des banques », analyse Laurent Zahles. « Ils s’en retournent vers ce qu’ils ontidentifiécommelemaillonfaibledela chaine sécuritaire, à savoir l’être humain. Ils amènent les clients, au travers des scé- narii de plus en plus crédibles, à révéler leurs identifiants ou à opérer des opéra- tions en leur faveur ». Renforcer la cyberrésilience des banques ne suffit donc pas, et il convient de sensi- biliser en continu le grand public à la fraudeenligne.Outrelesinitiativesprises par les banques elles-mêmes, l’ABBL a pu initier, ensemble avec laLuxembourg House of Cybersecurity et quatorze autres partenaires institutionnels, une première campagne nationale de sensi- bilisation. « Le fait que nous ayons pu mettre autour de la table des acteurs divers venant du secteur public, mais aussi des télécommunications ou de l’as- surance est très encourageant. Eu égard auxmoyens et aux canauxutiliséspar les criminels, la lutte contre les fraudes en ligne ne peut être de la seule responsabi- lité des banques. La solution ne peut être que dans un effort collectif. » Les responsablesduRBCLont également tiré un premier bilan sur la généralisation des virements instantanés et la mise en place de la vérification des bénéficiaires (Verification of Payee – VoP) effectifs le 9 octobre. « Les membres de l’ABBL ont été au ren- dez-vous, malgré le défi technique que comportait ce projet et des délais de mise en place très courts », analyse Laurent Zahles. Il invite les utilisateurs à mettre à jour leurs listes de bénéficiaires pour tirer pleinement profit de ce nouveau service et appelle à la vigilance : « La vérification des bénéficiaires est une avancée en matière de sécurité, mais n’est pas une totale garantie contre les fraudes. Il convientderesterattentifetd’observerles bonnespratiquesrégulièrementrappelées par les banques et les forces de l’ordre ». Vers une expérience bancaire fluide entre agences et canaux numériques Selon une étude menée par la Banque centrale européenne (3) , 50%des résidents souhaitent conserver la possibilité de payer en espèces. Cependant, seuls 13% rencontrent des difficultés d’accès au cash. D’après Claude Hirtzig (photo), chair du RBCL de l’ABBL : « Ceci confirme une excellente couverture au niveau national ». En effet, avec 58 distri- buteurs automatiques de billets (DAB) et 26agencesbancairespar100.000habitants, le Luxembourg continue d’être très bien placé par rapport auxmoyennes dans ses pays voisins, notamment considérant les faibles distances au seindu territoire. « Nous constatons une évolution quant à l’utilisationdes agences bancaires par nos clients. Nos clients viennent moins sou- vent – 2,4 visites annuelles en 2024, contre 3,1 en 2019 -, mais pour des opérations à plusfortevaleurajoutée»,poursuit-il.73% des résidents luxembourgeois déclarent ainsi venir en agence pour demander des conseilstelsquepourl’obtentiond’unprêt hypothécaire. En revanche, les retraites d’argent liquide sont en baisse constante depuis des années (-15%en 2024). Le point presse a aussi été l’occasion de revenir sur le projet de mutualisation du réseau de DABs mené par différentes banquesdedétail.Ceprojetapourobjectif d’assurerunmeilleurmaillageduterritoire pour tenir compte des évolutions démo- graphiques et urbanistiques, une plus grande sécurité et davantage de services et d’accessibilité. Une première phase test seralancéedébut2026.Cesévolutionssont àmettreenparallèleaveclagénéralisation desopérationscouranteseffectuéesautra- versdecanauxdigitaux.AuLuxembourg, 95%despaiementspeuventêtreeffectués sans espèces, plaçant le pays au 2ᵉ rang européen.Lesvirementsenligneprogres- sentfortement(+11%en2024),tandisque les paiements mobiles gagnent en popu- larité.PourClaudeHirtzig:«Celaneveut pas dire que lemétier bancairepassera au tout digital. Certaines banques iront plus loin, d’autres moins, en fonction de leur stratégie et des préférences clients. L’importantresteradegarantirunebonne interopérabilité des canaux et une fluidité entre les services ». Crise du logement : les banques réaffirment leur rôle de solution En faisant écho à ses propos sur les ouvertures de comptes, Laurent Zahles déclare : « Les banques ont toujours voulu faire crédit et font certainement partie de la solution à la crise du loge- ment ! » Il a rappelé l’attitude prudente et responsabledesbanques enmatièrede politique de crédit : « Une bonne partie des crédits qu’allouent les banques sont un réemploi des dépôts que leurs clients leurs confient. Elles ont donc la respon- sabilité de ne pas mettre à risque ces dépôts par une politique d’octroi de cré- dits hasardeuse. Et d’un autre côté, elles ne souhaitent pas placer les demandeurs decréditdansunesituationoùilsseraient dans l’incapacité de rembourser ». A l’été 2022, à la suite de la remontée rapide et importante des taux directeurs par la Banque centrale européenne dans lecadredesapolitiquedeluttecontrel’in- flation, le marché de l’immobilier s’est tendu : « Nous avons reçu moins de demandes de crédit, respectivement cer- tains dossiers n’ont pas pu se faire, car les demandeurs ne remplissaient plus les conditions d’octroi de crédits, d’ailleurs strictement encadrés au Luxembourg », commente Laurent Zahles. «Au cours de ces derniers mois, avec les effets cumulés de la stabilisation, voire de la baisse des taux d’intérêts, de la baisse momentanée desprixdel’immobilieretdel’augmenta- tion du pouvoir d’achat des ménages grâceauxmesuresdesoutientemporaires du gouvernement, la production de cré- dits a repris. » Au premier semestre 2025, 9 936 prêts hypothécaires ont été accordés pour des biens immobiliers situés auLuxembourg, (+39,9 % par rapport à la même période en2024)pourunvolumetotalde4,75mil- liards d’euros (+34,1 % en glissement annuel). En 2024, ces mêmes chiffres avaientdéjàaugmentéde18%ennombre de dossiers et de 8,8%envolume (4) . Face aux défis de la transition, l’épargne desménages au cœur du financement européen Enmatièred’investissements, ces récents mois ont permis de constater un regain d’intérêt pour les solutions d’investisse- ment après une année 2024 au cours de laquelle les dépôts à terme avaient ren- contré la faveur des clients en raison de lahaussedes tauxd’intérêt. «Au-delàdes habitudes et préférences des clients, la questionde l’épargne est àmettre enrap- portavecundébatpluslarge»,remarque Claude Hirtzig. « Nous savons qu’au- jourd’hui en Europe, près de 80% des besoins de financement des entreprises sontcouvertsparlescréditsbancaires.Or, malgré toute la bonne volonté des éta- blissements de crédit, cela ne suffira pas pour rassembler les quelque 1.000 mia d’EUR annuels qu’exige le financement de la transition durable et digitale, mais également celui du renforcement de la sécurité européenne. Ces défis ne pour- ront être surmontés qu’avec la mobilisa- tion parallèle de l’épargne dormante de nos concitoyens. » Pourquecescapitauxpuissentêtremobi- lisés, il convient notamment de finaliser l’Union de l’épargne et des investisse- ments européenne, afin notamment de faciliter l’accès à certains types d’investis- sements, mais également de multiplier les initiatives en matière d’éducation financière. Claude Hirtzig : « Nous devons accompagner nos concitoyens sur le chemin qui les amènera du statut d’épargnant passif vers celui d’investis- seur responsable, qui par ses décisions contribuera à façonner l’Europe de demain. » Il a mis en avant le rôle joué par la FondationABBLpour l’Éducation Financière. « L’Éducation financière est unefuséeàdeuxétages.Lepremierétage doit consister à permettre à tout un cha- cun de gérer son budget demanière avi- sée, en évitant les pièges du surendete- ment et en se protégeant contre la fraude financière. Le deuxième vise à donner aux individus les moyens d’aborder les investissements en toute confiance. Il s’agit de comprendre les risques et les opportunités des différents produits et services financiers, afin de prendre des décisions d’investissement éclairées. » 1 )https://urlr.me/YTkVMr 2 )https://www.abbl.lu/en/home/bank-account-opening 3 )https://short.do/IJ3mFv 4 )https://urlr.me/8SfcNH Les banques de détail luxembourgeoises face à la diversification des attentes de leurs clients E ndate du 31 octobre 2025, les agencesMorningstarDBRS et FitchRatings confirment la notation «AAA» duLuxembourg avec perspectives stables. Morningstar DBRS et Fitch Ratings sou- lignent la solidité budgétaire malgré les dépenses en matière de défense et liées au vieillissement de la population qui pèseront sur les finances publiques du Luxembourg. Malgré un déficit prévu de 0,8 %du PIB en 2025, la situationbudgétaire reste net- tement plus favorableque cellede laplu- partdespaysdelazoneeuro,grâceàune dette publique faible (26,8 % du PIB en 2025).MorningstarDBRSetFitchRatings saluent également l'efficacité des institu- tions, la stabilité politique et une écono- mie avancée et prospère. Ces évaluations constituent les premières notations depuis la présentation du Budget 2026 « Grandir ensemble ». Cette double confirmation du AAA témoigne ainsidelapertinencedel'orientationdela politique financière du gouvernement. Selon les agences, l'économie demeure exposée à des risques externes tels que la volatilité financière mondiale et les ten- sions géopolitiques. Ainsi, elles estiment quelacroissanceéconomiquerestemodé- rée en 2025, mais devrait s'accélérer dès 2026, portée notamment par le secteur financier. Source : ministère des Finances Morningstar DBRS et Fitch Ratings confirment le «AAA» du Luxembourg KirchbergLuxembourg @PhilippeSchroeder
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