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Mensuel : | Edition de avril 2009 |
Rubrique : | Finance/Economie |
Titre : | À l’agenda des leaders : une planète plus intelligente |
Article : | La crise des marchés financiers est venue nous rappeler avec force les réalités et les dangers de systèmes globaux hautement complexes. En réalité, tout au long de cette première décennie du XXIe siècle, nous avons été rappelés à l'ordre à intervalles réguliers. Le message était chaque fois le même: adaptez-vous aux nouvelles réalités de l'intégration globale.
Aujourd’hui, tout le monde s'accorde à dire que l’intégration globale modifie le modèle de l’entreprise et la nature même du travail. Et nous nous apercevons à présent que les flux d'informations, la mobilité du travail et les mouvements de capitaux au sein des pays développés et en voie de développement ne constituent qu'un aspect de l'intégration globale. Ces dernières années, nous nous sommes ouverts à la problématique des changements climatiques globaux et aux questions environnementales et géopolitiques liées à l’énergie. Nous avons pris conscience que les chaînes logistiques des secteurs pharmaceutiques et agro-alimentaires étaient devenues globales elles aussi. Et, bien sûr, nous sommes entrés dans ce nouveau siècle en voyant notre sentiment de relative sécurité se fragiliser à la suite des attaques terroristes du 11 septembre 2001. Ces prises de conscience collectives nous ont rappelé que nous sommes tous, aujourd'hui, reliés les uns aux autres – au niveau économique, technique et social. Mais nous avons également appris que ces connexions n'étaient pas suffisantes. Oui, la terre devient "de plus en plus plate" et, oui, elle continue à se rétrécir à mesure que les interconnexions se multiplient. Mais un phénomène se développe en même temps et il recèle un potentiel bien plus important: en deux mots, notre planète devient plus intelligente. Qu’est-ce qui rend possible cette évolution? - Premièrement, notre monde multiplie les équipements: Le transistor, inventé il y a 60 ans, est le bloc de construction de l’âge numérique. En 2010, notre monde comptera un milliard de transistors par tête d'habitant, chacun coûtant un dix millionième de centime. À la fin de cette année, on devrait avoir franchi le cap des 4 milliards d’abonnés à la téléphonie mobile. et, dans les deux ans à venir, celui des 30 milliards de balises (tags) d’Identification par radiofréquence. Des capteurs sont incorporés dans des écosystèmes entiers – chaînes logistiques, réseaux de soins de santé, villes... et même des systèmes naturels comme les rivières. - Deuxièmement, notre monde multiplie les interconnexions: Très bientôt, 2 milliards de personnes seront connectées à l’Internet. Mais, dans un monde si riche en équipements, les systèmes et les objets peuvent désormais également "se parler". Pensez à la perspective d'un monde où évolueront mille milliards de choses interconnectées et intelligentes – les voitures, toutes sortes d’appareils et d’équipements, les caméras, les routes, les pipelines... et même les médicaments et le bétail. Le volume des informations produites par l’interaction de toutes ces choses sera sans précédent. - Troisièmement, notre monde multiplie les équipements intelligents: De nouveaux modèles de traitement et de calcul informatique permettent la prolifération d’accessoires pour utilisateurs finaux, de capteurs et d’actionneurs ainsi que leur connexion avec des ordinateurs centraux. Ces ordinateurs surpuissants, qui ont recours à des techniques analytiques avancées, sont capables de transformer des montagnes de données en informations intelligentes qui peuvent à leur tour être traduites en actions, rendant ainsi nos systèmes, processus et infrastructures plus performants, plus productifs et plus réactifs – en deux mots: plus intelligents. Cela signifie en réalité que les infrastructures physiques et numériques du monde sont occupées à converger. La puissance de calcul informatique est introduite dans des objets que nous ne pourrions pas qualifier d’ordinateurs. En effet, presque tout – toute personne, tout objet, tout processus ou tout service, pour toute organisation, grande ou petite – peut acquérir une dimension numérique et être mis en réseau. Avec autant de technologies et de capacités de mise en réseau disponibles à un prix aussi bas, nous devons rendre nos entreprises, nos institutions et nos industries plus intelligentes. Pas uniquement aux moments de chocs à grande échelle mais d’une manière profondément intégrée, dans nos opérations de tous les jours. La façon dont nous menons nos activités ordinaires aujourd’hui – partout, dans les entreprises, au niveau des pouvoirs publics, dans la vie de tous les jours – et qui sont en définitive la source de ces crises qui nous prennent par "surprise", n'est pas assez intelligente pour être durable. Ainsi, je vous soumets les éléments de réflexion suivants: - La quantité d’énergie que nous gaspillons: Selon certaines études, les pertes d'énergie électrique en raison de réseaux non "intelligents" atteignent, partout dans le monde, des niveaux aussi élevés que 40 à 70% de l'énergie produite. - Le degré de congestion de nos villes: L'encombrement des routes en Belgique coûte 250 millions d'euros et représente 9 millions d'heures perdues – et c'est sans compter son impact sur la qualité de l'air que nous respirons. - L'inefficacité de nos chaînes logistiques: Les fabricants de produits de grande consommation et les chaînes de distribution perdent 3,5% de leur chiffre d'affaires, en raison d'inefficacités dans leur chaîne logistique. - L’archaïsme de notre système de santé: En réalité, ce n'est en en rien un "système". Il ne relie pas les opérations de diagnostic aux recherches sur les médicaments, aux prestataires de soins, aux assureurs et aux employeurs. Pendant ce temps, les dépenses de santé personnelles font plonger chaque année sous le seuil de pauvreté plus de 100 millions de personnes au niveau mondial. - L’épuisement des ressources en eau de notre planète: La consommation d’eau globale a été multipliée par six depuis le début du siècle dernier, soit deux fois plus que l'augmentation de la population humaine. Selon la Banque asiatique de développement, aujourd’hui, une personne sur cinq n'a pas accès à de l'eau potable sûre, et la moitié de la population mondiale ne dispose pas d’équipements sanitaires adéquats. - Et bien sûr, la crise de nos marchés financiers: Elle sera analysée pendant des décennies mais une conclusion peut d'ores et déjà être tirée. Les institutions financières ont réparti le ris-que mais n'ont pas été capables d'identifier ce risque – et cette incertitude, cette absence de compréhension précise, a sapé la confiance. Il est évident qu’il va falloir que nous opérions de manière beaucoup plus intelligente et performante – spécialement dans la recherche des prochains domaines d’investissement pour relancer la croissance économique et faire sortir de larges pans de l’économie globale de la récession. Heureusement, nous sommes capables de le faire. Nous le constatons dans la manière dont les entreprises et les institutions repensent leurs systèmes et réinventent les applications technologiques. - Le système intelligent de circulation à Stockholm a conduit à une chute de 20% du trafic, une réduction de 12% des émissions de gaz et une augmentation du nombre des usagers des transports en commun de l'ordre de 40.000 personnes. Les systèmes intelligents de circulation renforcent les positions compétitives des villes, de Londres à Singapour – et de nombreuses autres cités prévoient de s’engager dans cette voie. - Les technologies intelligentes des champs pétroliers peuvent augmenter à la fois les performances de pompage du brut et la productivité – dans une activité où seulement 20 à 30% des réserves disponibles sont actuellement exploitées. - Les systèmes intelligents de traçabilité alimentaire – comme il en existe un, qui est opérationnel dans les pays scandinaves – peuvent utiliser la technologie RFID (Identification par radiofréquence) pour tracer la viande et la volaille de la ferme jusqu'aux rayons des supermarchés en suivant toutes les étapes de la chaîne logistique. - Des soins de santé intelligents peuvent réduire le coût des thérapies jusqu’à 90% – comme le réseau ActiveCare Network y réussit actuellement pour plus de 2 millions de patients, en contrôlant la distribution correcte de leurs injections et de leurs vaccins. Je pourrais citer beaucoup d’autres exemples. Les systèmes intelligents transforment également les réseaux énergétiques, les chaînes logistiques et la gestion de l'eau. Ils assurent l'authenticité des produits pharmaceutiques et la sécurité des échanges monétaires. Et ils changent par ailleurs les business models des entreprises, jusqu'à la manière dont ces dernières permet-tent à leurs travailleurs de collaborer et d'innover. Dans une économie intégrée à l’échelle globale, les investissements et le travail ne se dirigent pas uniquement vers les endroits qui offrent des avantages en termes de coûts, d’aptitudes, de compétences et d'expertise. Ils s’orientent également vers les pays, les régions et les villes qui offrent des infrastructures intelligentes – un concept très vaste qui va des systèmes de transport intelligents, des aéroports modernes et des circuits commerciaux sûrs… à des réseaux énergétiques fiables, des marchés sûrs et transparents, en passant par une qualité de vie supérieure. Un travail considérable nous attend. Nous devons veiller à infuser de l’intelligence dans nos systèmes de prise de décision et de gestion... et pas uniquement à infuser plus de rapidité et de capacité dans nos processus. Mais une chose est claire: le monde continuera à devenir plus petit, plus plat... et plus intelligent. Nous entrons dans l’ère d’une économie, d’une société et d’une planète intelligentes et intégrées globalement. Le monde en gestation recèle d'énormes promesses. Et je suis convaincu que nous pouvons le faire advenir – si nous nous montrons suffisament ouverts d'esprit et si nous réfléchissons réellement à ce à quoi pourrait ressembler une planète plus intelligente. Bart Van Den Meersche, Country General Manager, IBM Belgium/Luxemburg |
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